Endométriose, le puzzle de la guérison
Article paru au printemps 2020 dans Belam MAG, magazine 100% bien-être en Pays de Savoie
Nous sommes allées à la rencontre de Séna, praticienne en Gestalt-thérapie à Saint-Jorioz. Elle accompagne des personnes dans un processus de PMA et des femmes souffrant de l’endométriose à mieux vivre sur les plans psycho-émotionnel et corporel, et à se reconnecter à leur féminité. Elle intervient également à la cure thermale de Challes-les-Eaux pour animer des cercles de parole.
Atteinte d’une endométriose profonde et sévère, elle a vécu un véritable calvaire pendant plusieurs années. Mais elle a cru fermement qu’une guérison était possible, et elle a tout mis en oeuvre pour y parvenir.
Elle nous a raconté son parcours hors du commun, qui l’a mené jusqu’aux confins de l’Inde.
BELAM MAG : Quand as-tu su que tu avais l’endométriose ?
SÉNA : J’ai pu mettre un mot sur ma souffrance en 2009. Ma gynécologue a posé le diagnostic, après plusieurs années d’errance. Mais les symptômes ne datent pas d’hier ! Comme de nombreuses femmes, c’est un long et difficile parcours avant de pouvoir clairement identifier l’origine des douleurs menstruelles.
Pour toi, les premières douleurs remontent à loin ?
Oui ! J’ai eu mes premières règles à 14 ans et les douleurs sont assez vite apparues. Au début c’était gérable, mais cela s’est rapidement intensifié. Dès 16 ans, j’ai commencé à prendre des traitements à base de plantes pour soulager les douleurs chaque mois. Cela a pratiquement pris presque 10 ans pour que l’on me parle d’endométriose !
Tu as toujours pu gérer la douleur ?
La douleur et moi, c’est une longue histoire ! Mon premier gynécologue m’a prescrit de l’Antadys. C’est un anti-inflammatoire que connaissent bien les femmes atteintes d’endométriose. Au début, cela m’aidait bien. Je prenais un comprimé au début de mon cycle et cela suffisait. C’était la pilule magique ! Mais au fil du temps, j’ai dû augmenter la dose. Après 3 ans, je prenais un comprimé par jour jusqu’à la fin du cycle. Au bout de 5 ans, j’ai augmenté la dose jusqu’à 3 comprimés par jour mais cela ne faisait plus vraiment effet. J’ai appris récemment qu’à la longue ce médicament peut avoir des effets néfastes sur la fertilité.
C’est quoi comme type de douleur. Peux-tu nous la décrire ?
Ça commence dans le bas ventre. C’est un peu si on y avait oublié des aiguilles ! C’est une sensation de déchirement. Il n’y a pas de bonne position pour la soulager. Je me mettais le plus souvent en positon fœtale et je ne bougeais plus. Et pour moi, cela occasionnait aussi des douleurs dans le dos, de fortes migraines et des nausées. Mais c’est différent pour chaque femme.
Comment as-tu fait lorsque l’anti-douleur ne faisait plus effet ?
Je suis passée par plusieurs phases. Au début, je prenais du Doliprane en plus, mais cela n’a plus suffit très rapidement. Après, mon gynécologue m’a fait passer à la Lamaline. À un moment, j’en prenais jusque 6 par jour, mais cela ne marchait pas vraiment.
Après cela, c’est devenu un cocktail à base notamment d’Ibuprofène, de Tramadol ou de Kétoprofène. Mon mari était vraiment inquiet… Et malgré tout cela, je n’étais pas vraiment soulagée. La douleur restait lancinante, elle me collait à la peau.
D’autant plus qu’au début les douleurs ne duraient qu’une semaine. J’avais trois semaines par mois pour profiter de la vie ! Puis c’est devenu deux semaines de tranquillité, une semaine avec les symptômes qui montaient crescendo, et une semaine au tapis. Et il y a quelques années, c’était tous les jours. Pas un jour sans douleur.
Quand plus rien ne soulage, on fait quoi ?
On devient folle ! Mon mari ne supportait plus de me voir souffrir. Une fois, il m’a amené aux urgences. Ils m’ont prescrit des gélules à base de morphine. Mais cela n’a pas fait grand chose à part me constiper !
C’est une spirale infernale. J’ai découvert ce que « chronique » voulait vraiment dire. Il n’y a pas d’accalmie, ou très rarement. De 2015 à 2017, j’ai pris des médicaments pratiquement tous les jours. Avec les douleurs, j’ai commencé à être sujette à l’insomnie. Peu de sommeil, plus de vie sociale, ni professionnelle… Je suis une dure à cuire, mais j’ai fini par tomber en dépression !
L’endométriose a eu un impact vraiment important sur ta vie…
Oui, pendant plusieurs années, je n’étais plus capable de travailler. Et comme beaucoup de femmes atteintes de cette maladie, je me suis progressivement isolée. L’endométriose est une maladie silencieuse, invisible et surtout très imprévisible. On peut se sentir bien en se levant le matin, et une heure plus tard, c’est l’horreur. C’est difficile pour planifier des sorties et faire des projets. L’endométriose a pris beaucoup de place à la maison. Mon mari a dû beaucoup s’occuper de la maison et de notre fille en plus de son travail. Faire en sorte que notre fille puisse avoir une vie d’enfant normale.
Tu as une fille ?
Oui, et à entendre les médecins, cela a été un petit miracle.
Cela a été difficile ?
Disons que cela fut une belle surprise. En 2011, nous étions prêts à fonder une famille. Mais cela ne fut pas si simple. Après plusieurs examens, j’ai subi une cœlioscopie avec un professeur réputé de la Pitié-Salpétrière. Après l’opération, il m’a indiqué que j’étais atteinte d’une endométriose de stade 4, le niveau le plus élevé. Il m’a expliqué qu’il avait pu retirer les adhérences sur l’ovaire gauche, mais pas sur l’ovaire droit qui aurait nécessité une opération plus lourde. Et surtout, il m’a annoncé qu’il serait très difficile d’être enceinte naturellement. Mon mari était présent. Nous sommes tombés en larme.
J’ai été mise sous ménopause artificielle pendant 3 mois et nous avons démarré les démarches pour une FIV. À la fin des 3 mois de traitement, je suis allé voir ma gynécologue pour faire le point et miracle… j’étais enceinte !
Bonne nouvelle ! Tout s’est bien passé ensuite ?
Oui, jusqu’à l’accouchement ! J’ai eu une grossesse épanouie, j’étais la plus heureuse au monde.
Mais à l’accouchement, rien ne s’est passé comme j’en avais rêvé : péridurale puis césarienne en urgence après 18 heures de travail. L’endométriose et ses conséquences imprévisibles s’étaient invitées à la fête !
Mon pronostic vital a été engagé durant la césarienne et j’ai subi une opération après la naissance de notre fille. Je me suis réveillée après plusieurs heures avec deux drains et une sonde urinaire. Je ressentais une très forte douleur et beaucoup d’incompréhension. Que s’était-il passé ?
C’est ce que le chef de service nous a expliqué deux jours plus tard. L’endométriose a parfois pour conséquences de déplacer les organes dans l’abdomen en créant des adhérences. Dans mon cas, la vessie était collée à la paroi de l’utérus. C’est notamment pour cela que le col de l’utérus ne pouvait pas s’ouvrir davantage et que la césarienne s’est imposée. Et l’obstétricienne qui ne savait pas que j’avais l’endométriose a été surprise au moment de faire l’incision. Elle a coupé ma vessie en quatre et elle a dû passer à travers pour sortir le bébé. Pourtant, je n’étais pas considérée comme une grossesse à risques.
Après deux semaines d’hospitalisation, nous sommes rentrés à la maison. Mais le bonheur a peu duré. Quelques heures seulement après être rentrée, je suis montée à 40°C de fièvre. Nous sommes repartis pour les urgences ! Après quelques heures pour établir le diagnostic, le verdict est tombé : endométrite. En d’autres termes, une infection de l’endomètre.
J’ai repassé une semaine à l’hôpital avec mon mari qui dormait dans le fauteuil pour s’occuper de notre fille. Ces premières semaines ont été intenses !
Que de péripéties ! Et l’endométrite est-elle liée à l’endométriose ?
À vrai dire, je n’en sais rien. Ce que je sais, c’est que l’endométriose offre un terrain favorable aux infections. J’en ai fait les frais deux fois !
La première fois en 2011. J’ai eu une pyélonéphrite, une infection du tissu rénal. Et la seconde fois en 2015. Nous nous préparions pour une FIV pour tenter d’avoir un second enfant. Dans le cadre des examens, on m’a prescrit une hystéro-salpingosonographie. En temps normal, c’est un examen gynécologique qui dure 10 minutes. Mais dans mon cas, cela s’est très mal passé, j’ai vécu ce qu’on appelle de la violence obstétricale. Dans la nuit qui a suivi, j’ai commencé à avoir de la fièvre malgré les antibiotiques. Deux jours plus tard, on m’a diagnostiqué une péritonite pelvienne. Cela arrive dans 1% des cas après cet examen ! J’ai été hospitalisé 10 jours, c’était très douloureux.
Tu as pu être remise sur pieds ?
J’ai été longtemps sous antibiotiques et le professeur a recommandé de m’opérer de nouveau pour traiter les adhérences endométriosiques et évacuer le liquide infectieux restant. Donc rebelote quelques mois plus tard !
C’était une opération qui présentait des risques, notamment d’avoir une colostomie car l’endométriose avait touché mes intestins. Durant l’intervention, on m’a retiré une trompe et un morceau de rectum qui était trop abimé. Mais j’ai échappé à la poche !
Après l’opération, je me souviendrai toujours du Professeur qui m’avait dit : « Madame Médard, pour vous l’endométriose c’est terminé ! ». Je l’ai cru sur le moment. En réalité, l’endométriose est revenue de plus belle et c’est à partir de ce moment que j’ai connu la pire période de ma vie, de 2015 à 2017.
C’est après cela que tu as ressenti les douleurs insoutenables dont tu parlais ?
Oui, c’est ce qu’on appelle une récidive ! C’est devenu pire qu’avant.
Comment tu as fait pour tenir le coup ?
Avec les douleurs chroniques, je me suis isolée, je ne sortais presque plus. Je ne pouvais pratiquement plus être avec les autres. Je prenais des médicaments dès le réveil et je passais des journées entre le lit et le canapé. J’étais arrivée au bout de mon énergie. Mais plusieurs événements se sont succédés et ont été déclencheurs.
Tu peux nous en parler ?
Tout d’abord, il y a eu une décision ferme de ne plus être opérée. Lors de ma dernière consultation avec le chirurgien, j’avais toujours très mal malgré la dernière opération. Il m’a dit qu’il pouvait me réopérer pour retirer les ovaires et la seconde trompe. Je me suis effondrée. Ce jour-là, j’ai décidé que je ne subirai plus d’opération.
Il y a eu un autre épisode. Un soir, je donnais le bain à ma fille. Elle voulait que je joue avec elle mais je n’arrivais pas. J’avais très mal, et j’avais du mal à parler. Je lui ai expliqué et elle m’a répondu : « tu as tout le temps mal maman, moi je veux que tu joues avec moi ». Elle avait 3 ans. Cela a été très difficile. Je passais à côté de moments précieux avec elle. Cela a déclenché une grande colère chez moi. J’étais confrontée à mon impuissance de façon très concrète. Ce soir-là, une profonde volonté de m’en sortir est née. Je me suis promise de trouver une solution et de parvenir à la guérison.
Et il y a eu un dernier fait marquant. Un jour, les douleurs ont duré de 14h à 2h du matin non-stop. Je vomissais tout ce que je prenais. Aucun médicament ne passait. J’ai perdu 2 kilos en une journée… Je tremblais, je pleurais. Et vers minuit, j’ai expérimenté quelque chose d’inattendu. J’ai eu l’impression de sortir de mon corps à tel point la douleur était vive. Sur le lit, je me voyais souffrir et en même temps, j’avais l’impression d’entendre mon corps qui me parlait. Et il me faisait passer des messages. Il me disait que je regardais dans une seule direction, sans chercher d’autres pistes. Il me demandait d’aller vers des pratiques alternatives. Après quelques instants, je suis revenu dans mon corps. C’était le silence total dans tous mes organes. Je me suis assise sur le lit et plus aucune douleur. Rien. Je me suis mise debout. Normal. Je ne comprenais rien. Plus aucune douleur. Le lendemain, j’avais une énergie folle, je n’ai pas pris un médicament de toute la journée.
Est-ce que tu arrives à expliquer ce qui s’est passé ?
Ce qui s’est passé cette nuit-là m’a dépassé. C’est ce qu’on appelle un moment « numineux ». Quelque chose de plus fort, de plus grand que moi, comme un instinct de survie. Je devais aller vers un mieux-être sur tous les plans : physique, émotionnel, psychique, social. J’étais arrivée au bout d’un chemin… ou d’un chemin de croix plutôt. Il fallait que je regarde ailleurs. Cela a déclenché chez moi une compréhension profonde que le corps est des capacités extraordinaires. J’ai compris que la guérison était possible.
Qu’est-ce que cela a déclenché ?
Énormément de choses ! Avec mon mari, on a mis en place un plan d’action. Avec des actions fortes. Tout d’abord, on a alloué une somme mensuelle dans le budget familial pour que je puisse faire des soins alternatifs. On a appelé ça « budget guérison ».
De mon côté, j’ai passé des journées entières à faire des recherches. Les forums, les blogs, les chaînes Youtube, les sites spécialisés… j’ai passé Internet au peigne fin !
S’en sont suivies deux années à consulter plusieurs praticiens, essayer différents types de soins. J’ai compris qu’il n’y aurait pas de recette miracle. La quête de la guérison est un puzzle… et les pièces sont nombreuses !
J’aime bien cette analogie du puzzle. Tu as assemblé combien de pièces ?
Beaucoup ! Chacune a joué un rôle plus ou moins déterminant. J’ai commencé par voir une énergéticienne. Après deux ans de souffrance, les soins énergétiques m’ont permis de refaire circuler l’énergie et réparer les fuites énergétiques créées par les multiples opérations chirurgicales. En parallèle, j’ai repris ma formation en Reiki que j’avais démarré dix ans plus tôt. J’ai passé le niveau III, et cela m’a permis de me faire des auto-soins.
En tant que praticienne en massage bien-être, je me massais aussi l’abdomen et le bas du dos pratiquement tous les soirs avec différentes huiles essentielles.
J’ai consulté une coach bien-être et j’ai commencé à me documenter sur l’impact de l’alimentation sur les maladies inflammatoires comme l’endométriose. Et j’ai commencé à changer la manière dont je me nourrissais. C’est une pièce du puzzle importante.
Qu’est-ce que tu as modifié par exemple ?
J’ai fait beaucoup de recherches et je suis passée par plusieurs phases. Mais par exemple, j’ai supprimé le gluten et le sucre raffiné, la viande rouge, le café et les produits laitiers. J’ai commencé à utiliser plus de curcuma aux vertus anti-inflammatoires, de la coriandre aussi. J’ai introduit plus de légumes et de fruits. Je me suis aussi tournée vers mon alimentation de base traditionnelle du Togo où j’ai grandi, c’est-à-dire beaucoup de farine de maïs et des sauces à base de feuilles, de gombo, etc. J’ai observé une amélioration très nette. Et je me suis mis à faire beaucoup de tisanes aussi !
Quels types de tisanes ?
Mon mari a sympathisé avec une herboriste, une ancienne pharmacienne. Elle m’a notamment conseillé l’achillée millefeuille. Elle nous a prêté sa machine à gélules et ses instruments de mesure. Elle a été vraiment adorable. Mon mari est allé en cueillir en montagne et ils ont fait des gélules avec son père.
Qu’est-ce que tu as testé d’autre ?
J’ai fait beaucoup d’acupuncture. Cela m’a beaucoup aidé à évacuer la colère, diminuer les maux de tête et faire circuler l’énergie. En parallèle, j’étais suivie par un ostéopathe renommé dans la région. Il jouait un rôle important pour dénouer les nœuds et détendre les douleurs dans le bas du dos. J’y allais toutes les 3 semaines.
Pour la gestion de la douleur, j’ai aussi commencé la pratique du yoga et la méditation. Et plus j’avançais, plus j’étais convaincue que l’émotionnel jouait un rôle important dans l’origine et la gestion de la douleur. C’est ainsi que je me suis tournée vers l’hypnose. Cela m’a permis de contacter mon enfant intérieur et les émotions qui étaient « congelées » depuis mes traumatismes de l’enfance. Et j’ai surtout commencé une thérapie avec un spécialiste de la psychogénéalogie et du symbolisme du corps.
Le symbolisme du corps ?
Oui, tout ce que le corps exprime a une signification. La maladie trouve souvent son origine dans un conflit particulier, un noeud à résoudre.
Ce qui fait écho à l’endométriose par exemple, c’est que « mon foyer est ailleurs ». La muqueuse de l’utérus va en dehors de la cavité utérine. Elle va se loger ailleurs. Et dans mon histoire, j’ai toujours vécu hors de mon foyer après la mort de mon père quand j’avais 8 ans. C’est aussi une maladie en lien avec la colère.
J’ai voulu aller plus loin. Alors j’ai commencé à me former en Gestalt-thérapie. J’ai énormément travaillé sur moi à travers les stages et cela a joué un rôle important dans la gestion des émotions, et donc de la douleur. Tout est lié.
Je me suis aussi formée en réflexologie pendant un an. Je suis aujourd’hui diplômée. Cela me sert par exemple pour réguler l’insomnie, le stress, la constipation ou les maux de tête.
Pendant deux ans, guérir est presque devenu une activité à plein temps ! J’avais beaucoup de rendez-vous, des week-ends de formation et je passais des heures sur Internet, j’échangeais avec d’autres femmes malades sur les forums.
Et tu as aussi fait la cure thermale de Challes-les-Eaux je crois ?
Oui, j’ai fait la cure en 2017 et 2018. Cela a été vraiment très bénéfique. J’ai vraiment beaucoup apprécié cette cure, et aussi l’ambiance entre les curistes et le personnel. Et depuis l’an dernier, j’anime des cercles de parole dans le cadre du programme « Mieux guérir de l’endométriose » que la directrice a mis en place. Ces temps de libération de la parole sont importants pour sortir de l’isolement.
Dans tout cela, qu’est-ce qui a eu le plus d’impact ?
C’est un tout interdépendant. Un puzzle comme je disais. Mais il y a des grosses pièces on va dire. La cure thermale en a été une. Mais le plus porteur, ça a été ma découverte de la médecine ayurvédique.
En 2016, j’ai rencontré une nutritionniste à Veyrier-du-Lac. Elle m’a aidé pour mon alimentation et m’a introduit à l’ayurveda. Et en 2017, nous sommes partis en Inde avec mon mari, dans le Kerala, pour faire une cure ayurvédique, le Panchakarma.
En quoi consiste la cure exactement ?
Le Pancharkarma, c’est un processus de purification en plusieurs étapes. Dès notre arrivée, la femme médecin nous a reçu pour un entretien. Elle m’a dit d’arrêter de prendre mes médicaments. C’était indispensable pour constater les effets du traitement qu’elle allait mettre en place. Je n’étais pas rassurée mais j’avais envie de faire confiance.
Mon mari et moi avons chacun reçu notre protocole de traitement, établi selon nos doshas. Dans l’ayurveda, les doshas sont trois énergies vitales et leur déséquilibre est considéré comme la cause des maladies. Pour faire simple, la cure consiste à les rééquilibrer.
Et comment ils s’y prennent ?
Il y a plusieurs types de soins et on en reçoit deux à cinq chaque jour. Dans mon cas par exemple, j’ai eu des massages à l’huile, des massages avec des pochons chauds qui contenaient soit une poudre anti-inflammatoire, des graines et du citron. Deux masseuses se relayent car c’est souvent très physique. Le massage se fait avec les mains et parfois les pieds pour dénouer les zones de tension. C’est intense et il faut abandonner ses repères occidentaux !
J’ai aussi eu ce qui s’appelle le basti, qui consiste en une purification et une revitalisation du colon avec de l’huile. Ou le nasya qui purifie la sphère ORL en administrant des gouttes et de la vapeur par le nez. Ça dégage sacrément ! Et enfin le shirodhara. C’est une pratique qui consiste à faire couler un jet continu d’huile tiède sur le troisième oeil.
Les journées sont rythmées par ces soins. Et aussi par le yoga qui se pratique à 6h du matin. Le reste du temps, c’était repos, balades aux alentours et causeries avec les autres curistes.
L’alimentation joue aussi un rôle important. Tout est préparé selon les principes de l’ayurveda. Et puis il y a plusieurs médicaments à base de plantes à prendre à chaque repas, et à poursuivre plusieurs mois après la cure.
Tu conseilles donc ce type de cure ?
Oui, absolument ! C’est vraiment efficace et cela a une dimension un peu initiatique. Sur place, mon mari a bien sympathisé avec le jeune médecin qui le suivait. Il a ouvert un centre avec son épouse dans le Nord du Kerala. Nous prévoyons d’aller y faire une cure et ensuite d’en organiser pour des femmes ou des couples qui souhaiteraient vivre cette expérience.
Et maintenant, comment te sens-tu ?
Aujourd’hui, je me sens pratiquement guérie. Je ne prends plus d’anti-douleurs ou très rarement. Les douleurs qui restent sont cicatricielles. Je vois un ostéopathe qui travaille pour dénouer les adhérences cicatricielles. Et je continue d’explorer d’autres pratiques : la médecine chinoise, la méthode Busquet, la réflexologie. Cette année, je suis même allée voir un guérisseur à mains nues des Philippines qui vient consulter une fois par an à Grenoble.
J’ai beaucoup reçu. Le temps est venu pour moi de redonner. Chaque praticien m’a apporté une pièce du puzzle de la guérison. Mais j’ai beaucoup tâtonner, j’ai passé beaucoup de temps à me documenter, à tester. J’aurais aimé rencontrer quelqu’un pour me guider. C’est donc ce que j’ai décidé de faire. Aujourd’hui, j’accompagne d’autres femmes à composer leur propre puzzle, en moins de temps que ce qu’il m’a fallu.
Comment tu t’y prends ?
Je crois qu’il ne faut pas avoir du peur du mot « guérison ». Notre corps a une capacité insoupçonnée si on sait être à l’écoute de ses signaux. Il y a un proverbe tibétain qui dit : « Si tu écoutes ton corps lorsqu’il chuchote, tu n’auras pas à l’entendre crier ».
Mais il n’y a pas de recette miracle. Chaque femme est singulière dans son histoire. Dans mon accompagnement, je les aide à trouver la voie qui leur correspond, en parallèle de leur parcours avec la médecine allopathique.
Je les invite à prendre la maladie sous ses 3 dimensions : énergétique, psycho-émotionnel et physique. Et je mets à profit tous les domaines dans lesquels je me suis formée : massage, réflexologie, Gestalt-thérapie, aromathérapie, symbolisme du corps, œuf de Jade, cercles de parole.
Avec la réflexologie par exemple, je permets aux femmes de gérer la douleur, traiter les problèmes d’insomnie, de digestion, de dérèglement hormonal. Avec mes connaissances en aromathérapie, je prépare des synergies pour un traitement de fond ou ponctuel en accompagnement d’un massage.
La place de la thérapie est également essentielle. Il faut oser ouvrir la boite de pandore pour explorer son histoire familiale, parce que l’endométriose est en lien avec les émotions. L’endométriose occasionne aussi de nombreuses répercussions sur le couple, le lien avec l’entourage, la vie professionnelle. Ce sont toutes ces choses que je traite dans mes séances de Gestalt-thérapie.
Pour finir, si l’endométriose était en face de toi là maintenant, qu’est-ce que tu aurais envie de lui dire ?
L’endométriose m’a empêché d’avoir une vie normale et d’avoir la famille nombreuse dont je rêvais. Elle m’a empêché d’avoir une vie professionnelle stable. Elle m’a rendu pratiquement invalide et elle m’a isolée du monde. Donc il y a quelques années, je lui aurais dit : « Tu as gâché ma vie et j’ai détesté être une femme. »
Aujourd’hui, je lui dirais : « Tu es mon coach ! Tu m’as enseigné des choses sur moi que je n’avais pas su écouter. Merci de m’avoir fait passer par tous ces chemins, ces rencontres, ces découvertes. Grâce à toi, j’ai appris à écouter mes besoins et j’ai osé sortir de ma zone de confort. J’ai découvert un potentiel chez moi que j’ignorais, ma capacité à aller vers les autres et demander de l’aide. Sans toi, je ne me serais peut-être jamais intéressée à la Gestalt-thérapie, la réflexologie, la méditation, au yoga… et je n’aurais pas rencontré toutes ces personnes formidables qui ont croisé ma route. »
L’endométriose nous pousse dans nos retranchements. Elle nous pousse à sortir de la femme sacrificielle pour aller vers la femme sacrée, résiliente, créative et authentique.